La météo contraint EDF à réduire encore sa production nucléaire
Alors que la saison estivale n'a pas commencé, les fortes températures obligent déjà EDF à réduire sa production. La sécheresse constitue une nouvelle menace sur la sécurité d'approvisionnement en électricité alors que la production nucléaire d'EDF est au plus mal, frappée par des problèmes de corrosion.
Par Sharon Wajsbrot
S'il est désormais courant de voir EDF réduire la puissance de ses réacteurs nucléaires au cours des étés caniculaires - pour limiter l'échauffement des cours d'eau -, il est beaucoup plus inhabituel de voir l'énergéticien procéder à ce type d'opérations dès le printemps. C'est pourtant ce qui vient de survenir dans la centrale du Blayais (Nouvelle-Aquitaine) dans la nuit de lundi à mardi.
Compte tenu de la température trop élevée dans l'estuaire de la Gironde, l'énergéticien a dû réduire de 100 mégawatts la puissance mobilisée de sa centrale. Or, au vu du niveau des températures attendues dans les prochains jours, la situation pourrait se reproduire.
Des restrictions de production
« En raison des prévisions de températures élevées de certains fleuves, des restrictions de production sont susceptibles d'affecter le parc de production nucléaire d'EDF à partir du lundi 9 mai 2022 jusqu'au dimanche 15 mai 2022, et plus particulièrement le site du Blayais », prévient l'énergéticien sur la plateforme qui liste ses réacteurs disponibles pour produire.
Les centrales nucléaires utilisent l'eau des fleuves (ou de la mer) pour refroidir leurs unités de production, et doivent respecter des seuils de températures maximales pour ne pas nuire à la reproduction des poissons et éviter la prolifération des algues.
C'est ce phénomène qui a joué au Blayais. Mais l'énergéticien a en outre pâti d'un effet de seuil. « Avant le 15 mai, c'est la réglementation hivernale qui s'applique avec un niveau de température de la Gironde maximal autorisée de 30 degrés. Après, le 15 mai, ce seuil passe à 36,5 degrés. Or, avec le réchauffement climatique, les températures montent parfois bien avant le 15 mai », explique Fabrice Guillon, à la CGT d'EDF. Aussi, chez EDF, des discussions ont été engagées ces dernières années avec les pouvoirs publics pour tenter de faire évoluer ces normes.
La flambée des prix risque de s'accentuer
Compte tenu des alertes à la sécheresse et de ces contraintes environnementales, une nouvelle baisse de production nucléaire n'est pas à exclure pour EDF cet été. Celle-ci interviendrait dans un contexte extrêmement tendu pour la sécurité d'approvisionnement en électricité des Français. EDF affiche déjà un taux de disponibilité de ses centrales proche de 50 %, avec 27 réacteurs arrêtés sur un total de 56. Du jamais vu dans l'histoire du groupe.
Toutefois, les pics de consommation étant traditionnellement plus élevés en hiver, lorsque le chauffage tourne à plein régime, l'été pourrait se passer sans encombre. Ce contexte risque néanmoins de renforcer la pression sur les marchés de l'électricité européens, qui s'affolent depuis le début de la guerre en Ukraine. En France, en particulier, l'électricité est devenue plus chère que dans certains pays voisins compte tenu des problèmes de disponibilités du nucléaire et des craintes sur l'approvisionnement en gaz.
Lire aussi :
Notre sélection d'articles sur le même sujet
ANALYSE - Electricité, gaz : l'inquiétude monte face à la flambée incontrôlée des prix
EDITO - Transition énergétique : Débat électrique
INTERVIEW - Energie : « La flambée des prix actuelle est inouïe »
En Europe, les stocks de gaz sont bas à l'approche de l'hiver
DECRYPTAGE -Electricité : pourquoi la facture des Français devrait gonfler
DECRYPTAGE Les entreprises face au piège de la flambée des prix de l'énergie
DECRYPTAGEFacture énergétique : la pression monte sur l'Etat pour amplifier son action
CQFDPourquoi les prix du gaz augmentent
DECRYPTAGELe prix des engrais tiré par la flambée des prix du gaz
Les aciéristes touchés de plein fouet par les hausses de prix de l'énergie
En Chine, des coupures d'électricité monstres forcent les usines à l'arrêt
VIDEO. 3 questions pour comprendre la vague de chaleur en France
Sharon Wajsbrot